Le 6 décembre 2019, le Conseil fédéral a adopté le projet d’un nouvel article du Code civil. À l’avenir, cela permettra aux enfants trans et aux personnes avec une variation du développement sexuel de modifier leur sexe officiel à l’aide d’une procédure simplifiée. Pour les enfants trans et intersexués, cependant, la situation juridique va s’aggraver. Transgender Network Switzerland (TGNS) et InterAction – Association Suisse pour les Intersexes invitent le Parlement à faire les améliorations nécessaires.
Avec le nouveau régime juridique il devrait être possible de modifier l’inscription du sexe, du prénom et du nom plus facilement grâce à une procédure administrative, rapide et peu coûteuse. Ceci sans la participation de tiers et en particulier sans preuve médicale attestant l’identité d’une personne.
Cette nouvelle procédure est destinée à remplacer les procédures judiciaires, longues, accablantes et surtout coûteuses (plusieurs centaines de francs). Bien entendu, cette démarche est à saluer, il est d’autant plus regrettable que seulement les adultes capables de discernement vont en bénéficier, en excluant les enfants. Cela a déjà été clairement critiqué par les associations des personnes intersexes et trans lors de la consultation sur l’avant-projet de mai 2018. Le projet de loi actuel, soumis au parlement, ne tient manifestement pas suffisamment compte de cette critique, notamment un point central.
Selon la pratique judiciaire actuelle, les personnes mineures, capables de discernement, peuvent faire elle-même la demande de reconnaissance de leur identité de genre. Ainsi, cette année, un Tribunal de district a statué sur la base du droit en vigueur qu’une fillette âgée de 9 ans avait été capable de discernement concernant le changement de son sexe dans le registre de l’état civil et de son prénom et qu’elle n’avait pas besoin du consentement parental pour le faire. Avec la norme proposée par le Conseil fédéral, elle aurait besoin de ce consentement à l’avenir. Si elle a le malheur que ses parents soient en désaccord et que, par conséquent, l’un d’eux n’y consente pas, elle devra à l’avenir aller devant les tribunaux. Dans une telle situation l’enfant devrait vivre pendant toute son enfance et sa jeunesse, jusqu’à ce qu’elle soit majeure, avec un prénom (et des documents officiels) traumatisant et contraire à son identité de genre.
«Le fait que le Conseil fédéral veuille priver de leurs droits les enfants qui ont besoin d’une protection particulière nous choque particulièrement en tant qu’organisation de personnes intersexuées», déclare Audrey Aegerter, Présidente d’InterAction Suisse, qui s’engage pour les droits des enfants avec une variation du développement sexuel. «Nous espérons que le Parlement corrigera cette erreur qui est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant. Et que le Conseil fédéral et le Parlement vont maintenant répondre rapidement à la demande la plus urgente de personnes présentant des variations de développement sexuel, une interdiction pénale des mutilations d’enfants présentant des variations de leurs caractéristiques sexuelles».
«Il est fondamental que la Suisse se voie enfin dotée d’une procédure fondée sur l’autodétermination et le bien-être de l’enfant. Pour les personnes dont l’identité de genre ne correspond pas à leur réalité de vie, toute leur vie quotidienne, leur participation sociale et professionnelle dans la société en dépend», ajoute Alecs Recher, qui en tant que juriste chez TGNS a déjà accompagné plusieurs centaines de personnes dans les procédures. «C’est maintenant au Parlement de prouver que la Suisse agit de façon exemplaire pour les droits des enfants».
Le projet de loi sera maintenant traité par le Conseil des Etats, puis par le Conseil National. InterAction Suisse et TGNS accompagneront conjointement ce processus législatif et examineront également de près les clarifications nécessaires promises par le Conseil fédéral dans les ordonnances.